numérique ≠ digital

Dans le milieu entrepreneurial et de marketing, les bons conseils autour du digital sont nombreux. Sans juger de la qualité des conseils stratégiques et de fidélisation des clients, l’usage du mot « digital » n’augure rien de bon sur la compréhension et les connaissances autour du sujet traité.

Un gif du fantasque Cyriak

En effet l’adjectif « digital » rapporte aux doigts. Que viennent faire nos manettes dans cette histoire? Certains arguent que ce monde est digital parce que nous y accédons avec nos doigts. Nous interagissons majoritairement avec les interfaces numériques grâce aux doigts, mais pas que. Les commandes vocales sont courantes dans les voitures modernes et il est possible d’interagir avec son smartphone par reconnaissance faciale. Mise à part l’usage habituel des doigts sur un clavier ou un écran tactile, le digital n’a rien en commun avec les inventions du numérique et l’espace qu’il ouvre.

Dans le contexte des captures d’écran présentées plus haut, le digital est un #buzzword, une tendance, une matière à FOMO pour celles et ceux qui veulent se placer en société et acquérir une aura sur un sujet qui s’impose. Comme d’autres, cette trend est anglo-saxonne.  Le numérique s’appelle digital en anglais. Peut-être qu’une stratégie numérique sonne plus classe en digital?

Quoi qu’il en soit cette précision que le numérique ≠ digital nous permet de s’attarder un instant sur la définition du numérique et sur le sens qu’il attache aux objets numériques.

Des définitions listées dans le Grand Robert, deux sont extraites ici:

  1. Qui est représenté par un nombre, des nombres arithmétiques (chiffres).

  2. Techn. Se dit de la représentation de données ou de grandeurs physiques sous forme de nombres (par oppos. à analogique) et par ext. de systèmes,  dispositifs ou procédés employant ce mode de représentation.

Ces deux définitions sont mises en avant car elle correspondent à la nature des objets numériques. Un texte ou une image stocké au format numérique est représenté par une suite de nombre.  Il faut bien sûr plusieurs couches de représentation entre l’écriture du texte, la prise de photo et leur représentation numérique, mais ces deux objets numérique sont in fine, au bout de la chaîne, représentés par des 0 et des 1. La photo prise avec un appareil numérique est stockée dans un fichier de suites de 0 et de 1. Ainsi le fichier picture.jpg de 1 Mo est composé de 1’000’000 octets, c’est-à-dire 1’000’000 x 8 bits, c’est-à-dire 1’000’000 x 8 (0|1). Bref, la nature du numérique est composée de 0 et 1.
Exemple tiré de l’article wikpedia sur l’octet:

 

27 26 25 24 23 22 21 20
1 0 1 0 0 0 1 1
Écriture de 27 + 25 + 21 + 20,
c’est-à-dire 163, dans un octet.

 

Ces objets représentés par des 0 et des 1 nécessitent une organisation de la représentation. C’est ici qu’intervient la seconde définition et que nous plongeons dans « la technique » et plus précisément la science computationnelle.  Comme on l’aperçoit avec l’exemple de photographie numérique, de nombreuses étapes intermédiaires ont lieu très rapidement entre la prise d’une vue et l’enregistrement d’une photo numérique. Il en va de même pour n’importe quel objet numérique ainsi que toutes les interfaces Homme/Machine. Que ce soit la souris, un écran 8K ou le touch screen d’un smartphone, il en faut des systèmes, dispositifs et procédés pour traiter le geste de l’utilisateur et lui fournir un feedback (visuel souvent).
Afin d’être considérés comme efficaces, ces systèmes sont conçus de façon à être le moins remarquables possible. Ils doivent fonctionner par magie, seamless,  afin de donner l’illusion à l’utilisateur que la représentation numérique de l’objet est elle-même l’objet. L’informatique perdrait de son attrait si l’utilisateur devait valider et reconnaître les étapes de traitement, standardisation et validation des objets entre leurs représentations et eux-même. Pourtant cette nature première de l’objet numérique doit être maintenue présente lors des discussions et décisions politiques, sociétale et citoyennes sur la réglementation de ces objets numériques. Prendre en considération cette nature, ses propriétés, avantages et limites est nécessaire pour débattre de la place et fonction sociale des objets qui portent les traits de cette nature.

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